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Entretien avec Nathalie Azoulai, Titus n’aimait pas Bérénice

Azoulai-Nathalie

Nathalie Azoulai, lauréate du Prix Médicis 2015 et du prix « Goncourt/Le choix de l’Orient » pour son romanTitus n’aimait pas Bérénice, répond à nos questions. Le roman, salué par la critique, a été finaliste des prix Goncourt, Goncourt des lycéens, et Fémina. 

Lecthot : Titus n’aimait pas Bérénice, fait un grand écart de trois siècles pour mettre en avant le caractère intemporel de l’œuvre de Racine, et selon vos propos « rendre la chair sous le marbre » ; à quoi tient selon vous une telle pérennité ?

Nathalie Azoulai : A la volonté que j’ai eue et taché de maintenir tout du long, de ne pas écrire un roman historique mais un roman actuel qui capterait la modernité de l’œuvre racinienne mais aussi l’intemporalité du processus créatif décrit. Quelle que soit son époque, un créateur reste un créateur, nourri de sensations, de visions et animé d’obsessions, de représentations formelles. C’est surtout là-dessus que mon roman insiste.

L. : « Si la lecture est une dissection, alors le commentaire ne peut être qu’une cicatrice.* » Votre œuvre a-t-elle une dimension cathartique ?
Pourrait-elle constituer l’espoir d’une consolation, que vous offrez aux lecteurs, pour qui vous avez « disséqué » Racine, en générant un processus de « cicatrisation » par votre analyse ?

N.A. : Aux lecteurs de le dire. Moi, j’ai juste mis en scène une femme qui cherche à comprendre et qui passe par la littérature pour le faire. Ce n’est pas forcément une consolation mais plutôt une volonté de comprendre, de gagner en intelligence par les textes et ce qui a motivé les textes. Pour ce qui est de la cicatrice, chacun la sienne. Pour une même opération, on obtient deux cicatrices différentes. Pour une même lecture, il en va de même.

L. : En tant qu’ancienne éditrice, que pensez-vous du concept de Lecthot, mettant en lien les auteurs, lecteurs et éditeurs, avec en amont un comité de lecture professionnel sélectionnant les textes soumis aux lecteurs puis aux éditeurs  ?

N.A. : C’est une idée courageuse et j’espère prospère. Un auteur a besoin d’être identifié, reconnu, choisi. Vous multipliez les possibilités de ce choix et vous faites une partie du travail. Reste à savoir si vos critères croisent ceux des éditeurs et de quels éditeurs vous vous sentez proches car il y en a de plusieurs styles et sortes…

L. : Quel(s) conseil(s) aimeriez-vous donner aux auteurs se lançant dans l’écriture d’un roman ?  

N.A. : De travailler régulièrement, avec constance, de ne pas avoir tout de suite envie de savoir où aller mais y aller, lentement, dix lignes par lignes. J’écris régulièrement mais assez peu chaque jour donc je ne peux parler que de la méthode que je pratique. Il y en a d’autres. Ce qui est sûr et commun à tous, c’est le projet littéraire et le travail qui va avec. Un autre conseil, ne pas se décourager au premier ni même au troisième refus, écrire va avec la maturation. On écrit dans le temps.

Propos recueillis par Victoire de Piédoue d’Héritôt 

*Titus n’aimait pas Bérénice, P.O.L, 2015. P.36 image caddy

 

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