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Entretien avec Thomas Le Douarec

Thomas Le Douarec, metteur en scène, comédien et scénariste, a adapté au théâtre Le Portrait de Dorian Gray, jouant le rôle de l’hédoniste Lord Henry. 

La célèbre histoire du jeune bourgeois londonien, dont les vices et le vieillissement ne s’actualisent que dans son portrait, est remarquablement mise en scène par Thomas Le Douarec. Le metteur en scène nous a reçus à l’issue de sa performance sur scène, avec un maquillage vieillissant encore intact sur le visage… Entretien.

La pièce

Le Portrait de Dorian Gray

Du 14 septembre au 31 décembre 2016

D’après le roman d’Oscar WILDE
Mise en scène de Thomas LE DOUAREC

Avec en alternance Arnaud DENIS ou Valentin de CARBONNIERES, Lucile MARQUIS ou Caroline DEVISMES, Fabrice SCOTT ou Maxime DE TOLEDO,  Thomas LE DOUAREC ou Olivier BREITMAN

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Lecthot : Comment se met-on dans la peau d’un personnage odieux ?

Thomas Le Douarec : C’est un personnage particulièrement odieux. Mais c’est un personnage que l’on aime haïr. Il a énormément de charme. Un charme vénéneux. Il est passionnant, fascinant ; il nous rend intelligent. Le texte est brillant, avec de nombreux niveaux de lecture et une grande profondeur philosophique. Je me régale. C’est un bonheur à jouer. En plus comme je suis également metteur en scène du spectacle et adaptateur, j’ai aussi un rôle d’observateur et le personnage aussi est dans l’observation. C’est une sorte de mise en abyme ; je me retrouve à la fois le metteur en scène du spectacle et le metteur en scène de l’histoire, à travers Harry. J’ai l’impression d’être un marionnettiste qui tire les ficelles.

 

L : Fait-on appel à ses propres émotions pour jouer « le diable » ?

T.L.D. : On fait appel à nous tout le temps, quel que soit le personnage joué. On va chercher en nous ce qui correspond au personnage. Il y a certainement en moi quelque chose d’odieux. On a tous en soi un côté ange et démon. Les êtres humains ont cette complexité passionnante, ce qui fait leur charme. Je pense qu’il y a en nous beaucoup plus qu’on ne le croit et quand on est acteur, on va puiser du côté obscur de la force. C’est ce que j’ai cherché dans le personnage de Harry. Donc j’éprouve une jubilation à être odieux. Cela doit être passionnant de pouvoir être odieux dans la vie, et avec un humour pareil à celui d’Harry tout passe.

 

L : Vous reconnaissez-vous dans Harry ?

T.L.D. : Je ne fais pas de différence entre lui et moi. J’essaie de ne pas en faire justement. J’essaie de l’incarner, de lui donner vie. C’est ce qui est passionnant dans la vie d’acteur, on a l’impression de vivre plusieurs vies, de s’enrichir de nous-mêmes et du personnage.

L’acteur est carnivore, il se nourrit des personnages qu’il joue et qui le nourrissent intellectuellement, même physiquement.

Il y a une école de théâtre qui s’appelle Gitis à Moscou, au sein de laquelle les étudiants travaillent un animal la première année. Choisissant celui qui correspond le plus à l’acteur, l’animal est travaillé pendant un an, tous les jours. Au bout d’un moment, on développe des muscles qu’on ne connaissait pas ainsi qu’une partie de notre cerveau qu’on ne soupçonnait pas. Donc on finit par devenir un peu cet animal. C’est un travail passionnant qui marche vraiment.

 

L : Qu’est-ce qui vous fascine dans Le Portrait de Dorian Gray ?

J’ai lu ce roman adolescent. J’ai une passion pour Oscar Wilde. C’est l’un des plus grands esprits de la fin du XIXe siècle, qui malheureusement n’a pas eu le succès mérité. Il a fini sa vie en prison, humilié, oublié, détruit. Cela fait finalement très peu de temps qu’on l’a réhabilité. S’il n’avait pas été condamné pour homosexualité, il aurait eu une autre carrière sans doute. Je suis persuadé aussi que c’était un grand auteur de théâtre et qu’il aurait adoré en faire une pièce. C’est l’un des romans les mieux dialogués que je connaisse. Donc c’était un peu lui rendre justice et lui rendre hommage, que de l’adapter aujourd’hui.

 

A écouter en intégralité sur lecthot.com

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