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Éric-Emmanuel Schmitt, le conteur bienveillant

Éric-Emmanuel Schmitt compte parmi les auteurs les plus lus au monde. Ses œuvres sont traduites dans une quarantaine de langues et font partie des ouvrages les plus étudiés dans les collèges et les lycées. Capable de parler simplement de thématiques aussi diverses que la foi, l’amour, la vie, la mort, la maladie, la philosophie et la tolérance, l’auteur âgé de 56 ans a été élu en 2016 par ses pairs pour devenir membre du jury du Prix Goncourt, à la place d’Edmonde Charles-Roux.

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Du piano à la plume

Tout commence le jeudi 28 mars 1960, à Sainte-Foy-lès-Lyon. Issu d’une famille sportive, un père boxeur et une mère championne de course à pied, le petit Eric-Emmanuel Schmitt forme cependant le rêve de devenir musicien. A 9 ans, le jeune garçon joue du piano et veut devenir compositeur. Un jour, alors qu’il accompagne sa mère à une représentation de Cyrano de Bergerac, il en sort bouleversé, éprouvant les prémices de sa vocation littéraire. A la fin de la séance, il pointe du doigt sur l’affiche le nom d’Edmond Rostand et déclare qu’il veut être comme lui. A 11 ans, passionné par le héros de Maurice Leblanc, il décide d’écrire la suite des aventures d’Arsène Lupin. Mais c’est à 16 ans, après avoir amusé ses camarades en jouant dans la pièce Antigone, montée par son lycée, qu’il compose sa première pièce, Grégoire ou pourquoi les petits pois sont-ils verts ? Une satire amusante sur l’éducation sexuelle. Garçon rebelle, agissant à rebours des idées reçues, il est notamment révélé à lui-même par la philosophie. Il entre à l’Ecole Normale Supérieure et obtient l’agrégation de philosophie.

Révélation mystique

Éric-Emmanuel Schmitt est baptisé avant tout par convention. « Mon père aurait aimé croire, c’était un athée malheureux », confie-t-il. En 1989, il vit une première expérience qui bouleverse sa vision de la vie, et marque un tournant dans son existence. Cette expérience, il la relate en 2015 dans son roman La Nuit de Feu.
Durant une traversée du Sahara, l’auteur s’éloigne du reste du groupe et s’égare dans les profondeurs du désert. Seul, perdu, il passe 36 heures sans boire ni manger. Saisi par le sentiment de ne faire qu’un avec l’univers, il conservera de cette aventure mystique l’impression que « Tout est justifié ».

Je suis né deux fois, une fois à Lyon en 1960, une fois dans le Sahara en 1989

Désireux de retrouver l’écriture, pour y confier sans doute cette émotion, Eric Emmanuel Schmitt publie en 1991 La Nuit de Valognes, une variation moderne sur le mythe de Don Juan, monté sur les planches avec l’aide d’Edwige Feuillère. En 1993, il publie Le Visiteur, qui relate une rencontre hypothétique entre Freud et Dieu. Cette pièce lui vaudra de remporter le Molière de l’auteur francophone vivant. Sa nouvelle notoriété le persuade de quitter son poste de maitre de conférences en philosophie pour se consacrer entièrement à l’écriture.

La Secte des égoïstes, son tout premier roman, paraît en 1994. 6 ans plus tard, L’Evangile selon Pilate voit le jour.

Une œuvre polymorphe

Disciple de Shakespeare, Diderot et Sophocle, Éric-Emmanuel Schmitt est également inspiré par Claudel, qu’il tente d’abord d’imiter, admiratif de ses envolées lyriques. L’auteur peine à trouver son propre style, retenu dans le pastiche, jusqu’au jour où il entend ces paroles d’une amie :

Tu rêves d’être Claudel ; et si tu étais Sacha Guitry ?.

Cette simple phrase le libère du pastiche, révélant sa propre prose. Avec son grand sourire, ses yeux pétillants, et sa voix douce, Éric-Emmanuel Schmitt est un véritable conteur optimiste, bienveillant :

Si le destin me prouve que j’ai eu raison d’avoir confiance, j’aurai gagné, et si le destin me prouve que j’ai eu tort, je n’aurai rien perdu, mais j’aurai eu une meilleure vie, plus utile, plus généreuse.

L’auteur, fuyant la monotonie, touche à tout, sans cesse à la recherche de nouveaux modes d’expression, se qualifie lui-même de « boulimique de travail ».

Je suis capable de faire exprès de ne pas faire pareil le lendemain histoire de ne pas avoir d’habitude. C’est carrément névrotique chez moi, je déteste les habitudes. 

Théâtre, musique, nouvelle, roman, cinéma, BD, tout est passé entre ses mains créatrices. L’écrivain polyvalent traduit Les Noces de Figaro de Mozart, s’essaye à l’auto-fiction (Ma vie avec Mozart), et au cinéma (auteur et réalisateur de Odette Toulemonde). En 2009, il adapte son plus gros succès : Oscar et la dame rose, un roman épistolaire sur la vie d’Oscar, un jeune garçon atteint d’une leucémie. Rien ne lui résiste, et surtout pas le théâtre. Eric-Emmanuel Schmitt prend en 2012 la direction du théâtre Rive Gauche en compagnie de Bruno Metzger, et y adapte L’élixir d’amour, avec la danseuse Marie-Claude Pietragalla.
La même année, il est élu académicien par L’Académie royale de la langue et de la littérature françaises de Belgique. Véritable consécration pour « l’écrivain du fauteuil 33 », occupé auparavant par Colette et Jean Cocteau.

Auteur à l’œuvre prolifique, conteur inspiré et inspirant, Éric-Emmanuel Schmitt est apprécié à la fois par la critique et le grand public. En véritable amoureux de la vie, il raconte dans son œuvre d’une générosité remarquable, le monde et ses curiosités, traitant les questions philosophiques avec sagesse et simplicité.

Fanny Kalinine

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