Depuis le mercredi 11 mai, la 69ème édition du Festival de Cannes met 21 films en compétition : Ma Loute, Mal de pierres, Toni Erdmann… Ce mardi 17 mai, la Julieta d’Almodóvar côtoie Personal Shopper d’Olivier Assayas, et Aquarius de Kleber Mendonça Filho.
La Julieta d’Almodóvar peut-elle remporter la Palme d’Or ?
Julieta est le film le plus apprécié de cette journée de projection. Il relate l’histoire d’une femme sur le point de quitter Madrid avec son compagnon, jusqu’au moment où une rencontre fortuite remet tout en question. Lorsqu’elle croise une ancienne amie de sa fille, les souvenirs lui reviennent, leurs poids tombent sur ses épaules. Dès lors, elle n’a plus qu’une seule idée en tête : revoir son enfant et comprendre pourquoi leurs liens se sont brisés. Elle abandonne l’idée de partir, et décide d’écrire une lettre à sa fille dans laquelle elle livre tout. Les douleurs d’une mère, les craintes, les mensonges. Pedro Almodóvar renoue ici avec les portraits de femmes, forts et poignants. Interprété par Adrianna Ugarta, et Emma Suarez, le 20ème film du grand réalisateur espagnol nous livre une héroïne touchante. Julieta est adapté librement de trois nouvelles de la canadienne Alice Munro, et sort au cinéma le 18 mai. Il s’agit du cinquième film que Pedro Almodóvar présente au Festival de Cannes.
Le film est applaudi, admiré, loué, à l’issue de la projection. Les journaux et les critiques français sont formels, Julieta est un film sublime, réfléchi, magistral. Si certains comparent sa technique à Buñuel, d’autres frissonnent tout simplement face aux réflexions imposées par le film : la fragilité des êtres et des liens qui les unissent, le temps qui passe, la culpabilité. Quelques clins d’œil à Fritz Lanz, Hitchcock, Bergman, font leur apparition dans une succession de prises captivantes. Si le film a plu en France, il a reçu de nombreuses critiques en Espagne. Selon, le journal « El Pais », le film « ne transmet rien », on passe « des heures de souffrances et de dédain ». Pour la Voz, “Si on s’attache aux chiffres, la popularité de Pedro Almodóvar n’est plus qu’un souvenir.” Mais n’oublions pas, que le scandale récent des Panama Papers a entaché la publication du film. En France, Julieta a cartonné, selon un quotidien espagnol “les Français n’ont qu’une envie : faire de lui un nouveau Buñuel”. Les journaux en font un portrait élogieux, le film d’Almodóvar est un film complexe qui traite de blessures intimes, dramatiques.
Kristen Stewart remarquée, pour un film critiqué
Face à Julieta, le film Personal Shopper d’Olivier Assayas, inspiré par Kristen Stewart, l’actrice principale. Le film, proche du conte fantastique, met en scène une jeune femme meurtrie par la perte de son frère jumeau, travaillant comme shoppeuse pour une célébrité. Loin des mondanités, la jeune femme fait ce métier dans l’unique but de payer son loyer. Également médium, elle attend la visite de l’esprit de son frère, mais commence à recevoir des messages inquiétants sur son téléphone.
Vivement critiqué, sifflé, le film se voit reprocher un récit bancal, des événements mal amenés, une intrigue lassante et une touche surnaturelle saugrenue, sans cohérence avec la carte d’identité du film. Si Personal Shopper fait polémique, de nombreux avis s’accordent néanmoins pour saluer la performance de Kristen Stewart.
Aquarius : Portrait d’une femme indépendante
Aquarius brosse le portrait d’une femme de 60 ans, Clara, en prise avec un agent immobilier qui souhaite racheter son appartement. Tous ses voisins ont accepté de vendre, sauf elle. Ce conflit va la replonger dans ses souvenirs et la pousser dans ses retranchements. Poétique, inquiétant, mélancolique, impressionnant, les adjectifs ne manquent pas pour évoquer ce film, sublimé par la performance très remarquée de l’actrice Sonia Bagia, jusqu’à maintenant plutôt habituée aux télénovas. Aquarius est aussi une réflexion sur le temps qui passe, s’essouffle et se meurt. Complexe et réfléchi, le film de Kleber Mendonça Filho surprend la critique. La beauté d’Aquarius réside également dans sa capacité à mettre en scène les problèmes actuels du Brésil de manière subtile et complexe.
La 69ème édition du Festival de Cannes se révèle jusqu’à présent fructueuse ; Ma Loute sépare la critique et fait polémique, American Honey fascine à travers Shia Labeouf, Mal de pierre émeut, Mademoiselle surprend…
Ce mardi 17 mai, les femmes étaient à l’honneur, aux prises entre la fiction et réalité, à travers les singuliers portraits féminins et la célébration du jeu des actrices.
L’un de ces trois films remportera-t-il la Palme d’Or ?
Fanny Kalinine