Lecthot vous présente Françoise Charbonnier, 61 ans, écrivain rhônealpine.
Lecthot : Comment vous est venue la vocation d’écrivain ?
Françoise Charbonnier : Enfant j’ai toujours aimé inventer des histoires que je mettais en scène. Plus grande j’ai découvert les livres : la bibliothèque rose avec le Club des Cinq. Je me plongeais dans leurs aventures avec délectation ; je faisais partie de la bande. J’ai senti très tôt ce frémissement en moi : cette envie de m’évader, de construire des histoires, de jouer avec la réalité. J’ai traduit cette envie en m’investissant pendant de nom- breuses années dans le théâtre. J’ai voulu en faire ma profession en tant que comédienne mais j’ai fait d’autres choix. Ce qui me passionnait plus que tout dans le théâtre c’était la mise en scène plus que le jeu d’acteur en tant que tel.
L’écriture est venue plus tard suite à une rupture amoureuse : mon premier amour. Au départ j’ai jeté sur le papier mon désarroi, ma haine, ma colère, ma solitude, mon chagrin. L’idée d’un récit construit a germé quand j’ai commencé une psychanalyse. L’activation des souvenirs par le verbe et le pouvoir des mots sur l’animation ou la réanimation d’émotions dont on n’a pas (ou dont on a perdu) la conscience, a un effet salvateur puissant. Rejouer l’intime dans le cadre sécurisé de la relation psychanalytique est une expérience forte, qui m’a permis de tracer mon chemin en tant que femme et écrivain. Ça a donné mon premier roman : Ultime Délivrance, publié aux Éditions du Rocher en 2012.
L : Pouvez-vous nous citer le ou les livres qui vous ont le plus marqué ?
FC : Plus qu’un livre ou des livres en particulier ce sont des auteurs qui m’ont marquée. Je citerai : Stefan Zweig , Paul Auster, Patrick Modiano, Nancy Huston et Marguerite Duras. Mais deux livres m’ont littéralement harponnée. Il s’agit de Lignes de faillede Nancy Huston dont l’architecture de la narration est époustouflante. Les thèmes abordés; ceux de l’enfance et de la filiation, du sentiment maternel (cher à Nancy Huston), de l’héritage familial et historique sont traités avec virtuosité. Le second estL’Amant de Marguerite Duras. Elle nous plonge dans un récit d’une sensualité torride avec poésie et une force d’évocation qu’elle seule sait écrire.
L : Parlez-nous du manuscrit que vous promouvez actuellement sur Lecthot.
FC : Sur Lecthot, j’ai proposé deux romans; Les Maisons Bleues et L’ Autre. Dans le premier, je ballade le lecteur au sein d’une famille ; je parle de ce que tout le monde peut voir et de ce qui se cache sous les apparences. Certains secrets se répètent tandis que d’autres remontent à la surface ou restent enkystés. Les secrets de famille peuvent-ils rester dans l’ombre ? Quand ils surgissent, que se passe t-il ? Faut-il dire ou se taire ? Est-ce dangereux de savoir pour conserver la qualité des liens? DansL’Autre, mon héros, Jean Moulin est marqué par le souvenir d’une relation « secrète » entre sa mère et son amant. Il est encore enfant quand L’Autre disparaît. Mais la trace laissée par cette relation qu’il a vécue en tant que spectateur comme fusionnelle, conditionne sa vie d’homme. Tout son être reste imprégné de la tension qu’il a perçu entre sa mère et cet homme. A cette tension est liée une odeur : celle du café noir. C’est cette odeur qui réveillera en lui tout un passé auquel il ne peut pas échapper. Je parle dans ce roman des représentations identitaires. Suis-je celui ou celle que l’on voit ? J’aime beaucoup ce roman qui est selon moi plus abouti que le premier.
Propos recueillis par Diane Daufresne.
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